Les faits sur le prix du lait au détail

Certains commentateurs ont circulé de fausses informations sur le processus derrière l’ajustement du prix du lait à la ferme et celui de détail pour les produits laitiers à l’épicerie en tentant de faire reposer toute la responsabilité de la hausse des prix au détail sur les épaules des producteurs laitiers. Pourtant, nous avons clairement démontré que la proportion réellement attribuable à la valeur du lait payée au producteur demeure limitée.

Mais revenons d’abord sur l’annonce d’un 2e ajustement du prix du lait à la ferme en cours d’année. Nous le savons : le prix aux producteurs est habituellement indexé une fois par année par la Commission canadienne du lait (CCL) sur la base d’une formule qui tient compte des coûts de production (50 %) et de l’indice des prix à la consommation (50 %). La décision est alors annoncée à la fin octobre, pour une entrée en vigueur le 1er février.

Les consultations de la CCL à l’automne 2021 l’ont amenée à annoncer, pour février 2022, une hausse importante de 8,4 % pour les classes 1 à 4, excluant les ingrédients, ce qui représentait un effet estimé d’environ 6 ¢ le litre pour les producteurs. Bien qu’historique, cette augmentation ne comblait pas la hausse astronomique du coût des intrants que nous vivons à la ferme depuis le début de 2022. En juin 2022, les coûts d’alimentation des bovins laitiers avaient augmenté de 18,9 % depuis le mois de janvier 2022, alors que l’engrais avait augmenté de 7,8 % et le carburant de 53,4 %. Ces postes de dépenses sont majeurs dans le coût de production du lait. À ces coûts s’ajoutent bien entendu la hausse des taux d’intérêt et l’inflation qui touchent l’ensemble des dépenses de nos entreprises.

Le mandat de la CCL est d’assurer un revenu équitable aux producteurs de lait efficaces. Le contexte exceptionnel en raison de la hausse des coûts nécessitait donc un ajustement en milieu d’année. C’est pour cette raison que la CCL a annoncé une hausse de 2,5 % du prix du lait à la ferme pour le 1er septembre 2022. Il s’agit ici d’une avance. Lors de l’examen régulier des prix à l’automne, le rajustement de septembre sera déduit de tout rajustement pour février.

En tant qu’entrepreneurs, nous essayons tous les jours de limiter les coûts et d’être le plus efficaces possible, nous le voyons d’ailleurs avec notre rendement alimentaire qui s’améliore et le temps de travail réduit pour produire un litre de lait. La hausse des coûts sévit partout sur la planète et touche tous les secteurs. Comme tout le monde, nous devons aussi nous adapter à la réalité actuelle. Bien sûr, nous comprenons que le consommateur subit lui aussi des pressions financières, et ce, dans tous les postes de dépenses, dont l’alimentation. Les ajustements au prix du lait étaient requis pour assurer la viabilité de nos fermes.

 

 

Dans les fausses informations qui ont circulé, il y a toutes celles entourant la fixation du prix du lait de détail ou dans les services alimentaires. Au Québec, le prix du lait de consommation au détail est règlementé en tenant compte du prix au producteur, mais aussi des demandes de transformateurs et de détaillants.

 

Dans les fausses informations qui ont circulé, il y a toutes celles entourant la fixation du prix du lait de détail ou dans les services alimentaires. Au Québec, le prix du lait de consommation au détail est règlementé en tenant compte du prix au producteur, mais aussi des demandes de transformateurs et de détaillants. Cette règlementation prévoit un prix minimum pour l’ensemble des laits et un prix maximum sur les laits réguliers. Pour le prix de détail des autres produits laitiers, ce sont les détaillants qui fixent les prix et ils sont ajustés à leur guise. Ceux-ci ne sont pas réglementés, le libre marché s’applique.

Lorsqu’un consommateur achète des produits laitiers à l’épicerie, le producteur qui produit et livre son lait ne reçoit qu’une portion du prix de vente. On parle ici d’environ 54 % pour le lait à boire et environ 14 % pour un yogourt, par exemple. Concernant le cas précis du beurre : considérant qu’il faut environ 9 litres de lait pour une livre de beurre, la valeur du lait est de 4,11 $, peu importe que le prix au détail soit de 5, 6, 7 ou 8 $. Les deux dernières hausses de 8,4 % et 2,5 % ont eu un effet très précis de 56 ¢ pour une livre de beurre, ni plus, ni moins. Le prix du lait à la ferme n’est donc qu’un des nombreux facteurs qui entrent dans la structure de coût du prix payé par les consommateurs pour les produits laitiers.

D’ailleurs, il importe de noter que l’indice des prix à la consommation (IPC) pour les produits laitiers a augmenté moins rapidement que l’ensemble des aliments au Canada ces cinq dernières années. Ainsi, l’IPC pour les produits laitiers a augmenté de 17,3 %. En comparaison, l’indice pour la margarine a crû de 44,8 % et de 36,9 % pour les huiles végétales[1]. Et selon les données compilées par la société Neilsen, le lait reste une option santé, de qualité et économique pour les consommateurs québécois, avec un prix moyen[2] de 2,10 $/litre. Les boissons végétales étaient vendues à un prix 12,7 % plus élevé pour la même période, soit 2,37 $/litre.

Grâce à la gestion de l’offre, le processus d’ajustement du prix à la ferme administrée par la CCL est public et transparent, ce qui n’est pas le cas dans d’autres secteurs où les prix sont ajustés discrètement et sans justification. La stabilité financière et l’environnement propice à l’investissement que nous procure la gestion de l’offre nous permettent d’innover, de nous améliorer et de faire des gains d’efficacité.

Les dernières années nous ont démontré à quel point nous sommes vulnérables face aux crises, notamment avec celle de la COVID-19, la guerre en Ukraine, les changements climatiques, les perturbations des chaînes d’approvisionnement et les pénuries de main-d’œuvre. Notre système nous permet de traverser les crises et de contribuer à la stabilité de notre économie, entre autres grâce à nos investissements et aux emplois liés à la production laitière. Les quelque 20 000 personnes qui travaillent quotidiennement dans les fermes au Québec se consacrent à produire localement un aliment de qualité et nutritif. Notre rentabilité est primordiale pour continuer à jouer notre rôle essentiel : nourrir le Québec.

[1] Statistique Canada, juillet 2017 à juillet 2022.

[2] Sur 4 semaines se terminant le 18 juin 2022.

 

 

SignatureDanielGobeil

 

Daniel Gobeil, président

 

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